Les falaises de Moher sont l’un des sites les plus visités d’Irlande. Situées dans la région du Burren, un parc national dans le comté de Clare, à l’ouest de l’Irlande et au sud de Galway.
J’ai pourtant attendu deux ans et demi pour y aller pour la première fois, escapade hivernale couplée avec les îles d’Aran (dont je vous ferai le récit dans un autre article. 😉 ).
Je vous livre ici ces premières impressions que j’avais écrites à l’époque. J’étais jeune, ça s’entend… Je n’écrirais sans doute plus la même chose aujourd’hui. 😉 Quelques photos en argentique également, de cette vadrouille dans une bien jolie région où je suis retournée de nombreuses fois lorsque j’habitais dans la région du Kerry… Et avec un avis différent que lors de cette balade ! 😉
Belle évasion !
« Weekend Burren / Iles d’Aran (27 janvier 2006-31 janvier 2006)
Départ Dublin et soirée à Galway
Il avait fallu que je prenne mes deux jours de congé reportés de 2005 en Janvier de la nouvelle année, stupide idée du management annoncée la 2e semaine de janvier. Les vols pour les destinations que je voulais étant trop chers, je m’étais dit qu’un petit week-end de 4 jours en Irlande me ferait du bien. J’ai donc posé mon Lundi 30 et Mardi 31 janvier, avec en tête un bon petit programme pour des destinations que je n’avais encore jamais découvertes : 4 nuits pour Falaises de Moher et îles d’Aran, dans l’ouest de l’Irlande.
A 17h, vendredi 27, après le taf, j’ai donc sauté dans le bus, mon sac sur le dos, direction Galway, où je passerais la nuit. Je n’avais rien réservé, me disant que de toute manière à cette époque, il y aurait largement de la place. Et puis, je ne voulais pas me contraindre à un circuit, voulais me laisser aller au gré de mes envies et des évènements. Je suis arrivée à Galway vers 20h45, me suis dirigée vers Kinlay House Hostel, une A.J que je n’avais jamais faite. Parce que oui, j’avais beau ne rien avoir réservé, j’avais emmené mon indispensable GDR (Guide du Routard) et quelques cartes détaillées de la région. Bon, j’ai posé mon sac dans la chambre, dortoir de 8 lits. Juste arrivée, on m’a proposé d’aller prendre un verre au pub. C’est parti vers ce pub dans lequel j’avais toujours refusé de mettre les pieds parce que dénaturalisé de touristes l’été ! Pourtant, en hiver, même avec quelques Australiens, c’est un pub biscornu au décor convivial et à l’atmosphère très joviale. Et où la Guinness est bien servie de surcroit ! 🙂
Trajet en bus Galway – Doolin à travers le Burren
Samedi matin, quatre heures de sommeil dans les yeux, en route vers la station de bus de Galway, à deux pas de l’hostel. J’avais comme plan de me rendre à Doolin, petit bled côtier du comté de Clare, au sud de Galway. Et de là, prendre le ferry pour les îles d’Aran. Le plan, c’était de passer une ou deux nuits sur les îles et de revenir à Doolin en ferry d’où je marcherais pour rejoindre les falaises de Moher qui se trouvent à quelques miles de Doolin. C’était à peu près ce que j’avais en tête…
Nous n’étions que 9 passagers au départ de Galway, principalement des irlandaises, étudiantes à Galway sans doute et qui rentraient chez leur joli papa-maman pour le weekend. Une quinzaine de kilomètres après Galway, le bus quitte la route principale, tourne à droite, direction Kinvarna. La route se rétrécit, se cabosse. Les paysages deviennent plus sauvages, plus arides. C’est le Burren. Une région particulière, des paysages que je n’avais encore jamais vus en Irlande. De la roche, de la caillasse, beaucoup. Mais pourtant, de la verdure… comme toujours. On est passé par Lisdoonvarna. Une chanson raisonne dans ma tête… Christie Moore. Lisdoonvarna est aussi célèbre pour accueillir tous les mois d’août ou de septembre depuis des années un festival de rencontres des célibataires… parait que c’est à faire… tous les fermiers célibataires d’Irlande s’y rendent ! Ah ! Ah ! mais parait aussi que les demoiselles se doivent d’être accompagnées, et encore, elles ne sont pas à l’abri d’être invitées à danser même si un élu est déjà à leurs côtés… Parole d’une de mes anciennes collocs, d’une vingtaine d’années qui y est allée avec son copain l’été dernier ! Retour à mes moutons (bah oui, évidemment ! …). A un moment, j’ai voulu aller taper causette au chauffeur. Mais la route est devenue… très irlandaise ! ça rétrécie, ça virage, ça monte, ça descend, ça cabosse, ça tete-d’epingle…. J’ai préféré laisser le chauffeur se concentrer sur la route et rester bien sagement assise à mon siège en profitant des paysages !
Il y avait un touriste à l’accent germanique aussi dans le car avec un maigre sac citadin sur le dos. Il est descendu en pleine cambrousse, une dizaine de kilomètres avant Doolin. Quand il a vu une jeune fille descendre là, une locale je pense, il a demandé au chauffeur si c’était « Le Burren ». Le chauffeur l’a regardé, encore surpris des curiosités que peuvent demander ces touristes. Le chauffeur lui a répondu que Le Burren, c’était une région mais que oui, effectivement nous y étions. S’il voulait, le touriste pouvait descendre un peu plus loin. Le touriste allemand de répondre, « non, je veux aller au Burren » et le chauffeur, en rouvrant la porte et le laissant s’échapper, de lui répondre « va voir… ». Je n’ai pu m’empêcher de glisser un petit sourire quand j’ai vu l’homme prendre la direction d’une demi-route de campagne plutôt que de suivre la route principale que le bus prenait. Je me demandais où cet homme dormirait cette nuit-là… Et ce sourire m’est revenu quand un kilomètre plus tard, nous arrivions dans un bled… si l’homme avait seulement suivi la route principale…
Improvisation et… à pied jusqu’aux falaises de Moher!
Je suis arrivée à Doolin ensoleillé vers 13h je crois, après un peu plus de deux heures de trajet. L’arrêt d’après, c’était les falaises de Moher. Avant de descendre, le chauffeur, se doutant de mes intentions, habitué, me dit qu’il n’y a pas de ferry pour les îles d’Aran, que c’est fermé. Je me dis que je verrais bien, que je préférais vérifier par moi-même, au cas où. Et qu’au pire, je pourrais retourner sur Glaway en bus. Doolin a la particularité de ne pas vraiment avoir de « centre-bled », magasins, b&bs, vaches, éparpillés ici et là. Réputé pour sa musique traditionnelle et marketisé comme le « Town traditionnel irlandais », c’est néanmoins un charmant village, entre mer et montagne, entre bleu et vert et gris et roux.
Quelques photos, quelques provisions à l’épicerie du coin tenue par une gentille gamine d’une quatorzaine d’années qui m’a indiqué le port où je pourrais prendre le ferry pour les îles. Heureusement que j’avais retiré du cash à Galway parce que pas de distributeur ici. Je me dirige tranquillement vers le petit port. Purée ! Il y a des surfeurs ! Mais ils sont fous ! ça doit cailler ici ! Je vais vers les cabanes où sont indiquées les Iles d’Aran. Je vois bien qu’elles sont fermées mais me dis que c’est peut-être fermé pour le lunch. Je me rapproche, trouve le panneau « prochain départ ». Prochain départ : 02 mars 2006… Ah… Bon…. Comme quoi, il faudrait toujours écouter les chauffeurs de bus…
Je reste un peu sur le port, profiter du joli paysage qui s’offre à moi, sous un grand ciel bleu de plus. Me demande quand même ce que je vais faire. Plus haut, j’ai regardé un « hostel » (Auberge de jeunesse), que mon Guide du Routard me dit ouvert à l’année. Il était fermé… Guide du Routard, pas très fiable pour ses adresses, c’est bien connu. Pas grave, il y a quand même quelques b&bs. J’avais aussi regardé le prochain bus pour Galway : C’était le lendemain matin, Dimanche, à 13h45, 24 heures plus tard. Je me suis dit que bon, je pouvais me mettre en route pour les falaises de Moher. Sur ma carte, c’était à peu près à 7-8 kilomètres. Si je marchais bien à l’aller, je pourrais rester un petit moment sur le site et revenir vers 17 heures à Doolin où j’aurais le temps de trouver un b&b pour passer la nuit en attendant de repartir le lendemain. Ça m’embêtait parce que ça me faisait perdre qoisiment une journée, celle du Dimanche. Mais de toute manière, j’étais coincée ici, alors autant essayer de faire au mieux ! Mon sac sur le dos, mes copines de rando dans les pieds, je me suis donc mise en route pour les falaises de Moher. Ces falaises font 215 mètres de haut. Doolin étant un port, au niveau de la mer, ça veut donc dire que les quelques kilomètres qui me séparaient des falaises s’annonçaient… grimpants ! Mais jolie balade, vraiment magnifique ! Vue sur la mer en permanence, vraiment très chouette. J’étais toute seule, en tout je n’ai même pas croisé dix voitures ! Cameron en bandoulière (mon appareil photo, c’est son petit nom, un mix entre camera et Canon 🙂 ), il a déjà mangé une pelloche avant d’arriver aux falaises, peut-être même la deuxième était en route, je ne m’en souviens plus.
Falaises de Moher : déception d’une première fois
J’aperçois un peu plus loin sur la gauche, un parking avec pas mal de voitures et cinq cars. Et des gens qui grimpent et qui dégrimpent de l’autre côté de la route. Merde ! C’est pas possible ! Même en Janvier c’est bondé de monde ?! Bon, pas grave, je m’engage moi aussi vers le sentier qui doit me mener au sommet des falaises. Des gens. Beaucoup. Tous au même endroit, limite s’ils ne pousseraient pas leurs voisins pour avoir la meilleure place, prendre la photo des cartes postales. Celle où l’on voit les falaises composées de roche sédimentaire, juste en face, toutes alignées, tournées vers l’Océan Atlantique, imposantes de leur hauteur. Je suis restée environs 45 minutes là-haut. Et puis, on ne pouvait même pas aller le long des falaises, le sentier était fermé, une grue dessus… décevantes falaises, dénaturalisées. Normal, peut-être. En fait, je ne m’attendais pas à voir autant de monde ici en janvier. Egoïstement, je pensais les avoir pour moi toute seule… J’ai en fait préféré ma balade depuis Doolin que les « Cliffs » elles-mêmes.
Sentier en haut des falaises de Moher Tour O’Brien, falaises de Moher
Retour vers Galway ou savoir être opportuniste
Bon, je me suis dit qu’autant profiter du fait que ce lieu soit touristique. Je suis redescendue au parking, j’ai demandé à un chauffeur d’un des cars s’il ne rentrait pas sur Galway. A ce moment-là, je me suis dit que même s’il m’emmenait ailleurs, à Ennis, ou Cork, j’irais après tout, ce n’était pas les plans mais c’était bien quand même ! Lui, non, il n’allait pas à Galway mais
– Billy ! Viens par ici ! Cette lady veut aller à Galway !
J’enlève mes lunettes de soleil, offre un grand sourire à Billy, et lui demande s’il n’a pas un siège de libre pour moi. S’il y a une chose que j’ai appris en Irlande, c’est qu’avec un sourire, on ne vous refusera jamais rien… surtout si vous sortez votre accent français en plus ! Ah ! Ah ! 🙂 Billy me dit que pas de problème, il a seulement 20 personnes et c’est un car de 53 places. Je lui demande combien ça couterait. 10 euros il me dit. Moins cher que ce que j’aurais payé le lendemain et que ce que j’avais payé pour venir. Contente d’avoir payé ses trois pintes de la soirée à Billy, je monte dans le bus. Il part dans dix minutes, me dit de faire attention ou je m’asseois, qu’il n’y ait pas déjà des affaires « si tu vois ce que je veux dire ». D’accord Billy, pas de problème. Le car part. Et, surprise ! C’est un tour guidé, musique irlandaise et chauffeur guide ! Ah ! Ah ! Habituellement, c’est vraiment le truc que je n’aime pas du tout mais bon, contente d’avoir trouvé un « lift » pour rentrer sur Galway, je me laisse prendre au jeu, admire les paysages et tourne la tête quand le chauffeur montre un élevage de lamas du côté gauche de la route. Il nous a fait deux arrêts dans le Burren avant d’arriver à Galway. Ce qu’est cool, c’est qu’il est passé par une route différente que celle que j’avais empruntée le matin !
Suite de l’improvisation à Galway et rencontres du lendemain
Je suis arrivée à Galway vers 17 heures. Je suis directement allée au bureau de la compagnie de ferries pour les Iles d’Aran. Pour s’y rendre, il faut prendre un bus jusqu’à Rossaveal, à 40 kilomètres à l’ouest de Galway, d’où le ferry nous emmène pour Inishmore, la plus grande des trois îles. Je prends mon ticket. Je demande de laisser un ticket ouvert, ne sachant pas quand je reviendrai. Il m’informe qu’il n’y a pas de liaisons l’hiver entre les trois îles et que donc je serai obligée de rester sur Inishmore. Ok, ça marche pour moi. Le bus part de Galway a 9h30 le Dimanche matin pour rejoindre le ferry qui part une heure plus tard. Me suis dirigée ensuite vers le Sleepzone, un hostel que je connaissais et très confortable. J’étais naze et avais envie de passer une bonne nuit, longue et reposante avant d’entamer mon Dimanche. Les courbatures de la journée se faisaient déjà sentir dans les jambes et les épaules. Eh ! Je n’avais que deux heures de sommeil dans chacune de mes deux cernes qui descendaient déjà jusqu’aux orteils ! J’ai pris un dortoir filles de six lits. Il y avait deux Canadiennes de je ne sais plus où dans l’ouest du Canada. Et aussi une asiatique de je ne sais pas où.
J’ai pris mon dîner dans la grande cuisine, en compagnie d’une Italienne et d’un Anglais. L’Italienne était en Irlande pendant 15 jours pour sa thèse sur la mythologie, légendes, histoire irlandaises… sujet très lourd ! Elle me disait que jusqu’ici elle n’avait pas été très chanceuse. Elle n’avait pas rencontré de « conteurs ». Je lui ai dit que le seul moyen c’était d’aller dans les pubs et d’aborder les locaux. Les Irlandais sont d’adorables bavards, ils peuvent parler pendant de heures ! … Surtout après quelques pintes. Elle m’a posé des questions sur moi, sur ma vie en Irlande, comment j’étais arrivée là, si j’aimais. Comme à chaque fois, les gens sont surpris par mon parcours. Ça semble incongrue une jeunette de 20 ans qui débarque dans un petit bled paumé perdu au milieu de l’Irlande, sans connaître personne, par un bon Dimanche de Juin… Et qui, deux ans et demi après est toujours là, et aime toujours autant ce pays. M’ont proposé d’aller au ciné avec eux, lui l’Anglais et elle l’Italienne. J’ai gentiment décliné l’invitation, trop fatiguée. Me suis couchée vers 21 heures, chancement, mes co-chambreuses ont éteint la lumière une demi-heure plus tard et je n’ai pas eu besoin de compter les moutons vus dans la journée pour m’endormir ! Vers 6h30 malheureusement j’étais réveillée pas la co-chambreuse asiatique qui, je ne sais pas ce qu’elle faisait, mais est restée une éternité dans la chambre à trifouiller un sac plastique ! Vous avez déjà entendu un sac plastique bouger à 6h30 un Dimanche matin, au réveil ?! il n’y a rien de plus agaçant ! Bon, j’ai somnolé ensuite jusqu’à 8 heures. Au petit dej’, me suis retrouvée à p’tit déjeuner avec un bavard allemand. C’est ce qui est dur pour moi dans les A.J. Je suis plutôt d’humeur massacrante le matin. Alors je prends toujours sur moi dans ces moments-là et j’essaie non seulement d’articuler et de relever le nez de ma tasse de café, mais en plus de faire des phrases avec des subordonnées relatives, conjonctives, et même des adverbes ! Cet Allemand, d’une trente-cinquaine d’années, peut-être même quarantaine, faisait le tour de l’Irlande tout seul. Il était subjugué par mon rapport à l’Irlande (comme quoi, même le matin, c’est un sujet dont j’arrive à parler !). Et quand je lui ai demandé ce qu’il faisait en Irlande, il m’a répondu quelque chose qui m’a paru bizarre d’abord mais qui ensuite m’a fait plaisir. « J’essaie de faire comme toi, de trouver ce que tu as trouvé ici, de ressentir les mêmes choses ». Je me suis dit que je devais avoir de la chance de me lever tous les jours et d’apprécier tous les jours passés ici comme si c’était mon premier. Je ne m’en lasse pas. M’en lasserai-je un jour ? Enfin bon, à ce monsieur, je lui ai répondu que je ne l’avais pas cherché. Que ça c’était passé comme ça. Un sentiment. Un coup de foudre pour un pays, pour ses habitants. Et qui dure toujours. Avant de me quitter, il m’a remerciée, je lui avais filer un coup de « boost » avec mon enthousiasme. Jusqu’à présent, il n’accrochait pas trop avec l’Irlande, les Irlandais. C’est vrai que ce sont deux cultures qui sont très différentes sur des points fondamentaux de chacune de ces cultures. Et que, j’ai croisé beaucoup d’Allemands ici qui n’aimaient pas l’Irlande, les Irlandais, qu’ils trouvent trop je-m’en-foutistes, qui boivent trop, qui sont mal éduqués. Et inversement, souvent, les Irlandais trouvent les Allemands trop strictes, trop sérieux, voire associables. Choc des cultures, comme toujours.
J’ai filé prendre mon bus. Purée ! il y a du monde, une bonne cinquantaine de personnes ! Il faut un deuxième bus… Il arrive dans deux minutes… Deux minutes irlandaises nous dit le chauffeur en se marrant. Effectivement, vingt minutes plus tard, notre deuxième bus arrive. »
(A suivre).
J’ai publié la suite de ce récit dans un nouvel article, pour la partie sur les îles d’Aran. Cliquez ici pour la lire ! 🙂