Menu Fermer

Derry Girls : Pour tout savoir sur la série télé à succès !

Derry Girls

Derry Girls est une série télévisée britannique qui a été popularisée à l’international grâce à sa diffusion sur Netflix fin 2018.

Je la conseille vraiment à tous ceux qui ont un intérêt quel qu’il soit pour l’Irlande, mais aussi à tous les amoureux des séries télévisées. Derry Girls est complètement novateur en termes de sujet et d’approche (faire de l’humour sur un fond historique grave). De plus, la série permet vraiment de comprendre la société dans laquelle se situe l’histoire, à bien des égards. C’est à ce titre comme un portrait sociétal de l’époque. La série est pourtant intemporelle il me semble. Elle parle de la jeunesse, de l’école, des relations familiales, et beaucoup de gens peuvent s’identifier ou se reconnaître dans les personnages, d’une manière ou d’une autre.

YouTube

En chargeant cette vidéo, vous acceptez la politique de confidentialité de YouTube.
En savoir plus

Charger la vidéo

L’article est assez complet. Vous pouvez tout à fait le lire en entier (je vous le conseille 😉 ), mais vous pouvez aussi le « picorer ». Pour cela, j’ai détaillé le plan de l’article ci-dessous. Il vous suffit de cliquer sur l’intitulé de la rubrique pour vous y rendre directement et ne lire que ce qui vous intéresse. 🙂

Et même si la série télé ne vous intéresse à priori pas, je suis sûre que vous apprendrez quand même des choses intéressantes sur l’Irlande en lisant cet article ! 😉

Derry girls, c’est quoi ?

Derry Girls est une série télévisée qui raconte la vie de cinq adolescents et de leurs familles en Irlande du Nord, dans les années 1990. À cette époque, l’Irlande du Nord est encore en pleine guerre civile entre catholiques et protestants. Derry Girls est pourtant bien une comédie. Le premier épisode a été diffusé en Janvier 2018 sur la chaîne britannique Channel 4 (également très regardée en République d’Irlande). C’est la série télé qui a eu le plus d’audimat sur Channel 4 depuis environs 25 ans. A ce jour il existe deux saisons, de 6 épisodes chacune, qui sont désormais aussi disponibles sur Netflix. La série a aussi été diffusée par RTE One, chaîne publique de la République d’Irlande.

Ça se passe où ?

À Derry, me direz-vous. 😉 Oui, Derry, ou Londonderry de son nom officiel britannique. Car oui, si Derry se situe bien sur l’île d’Irlande, elle fait officiellement partie du Royaume-Uni, comme tout le reste de l’Irlande du Nord. On y paie en Livre Sterling (en Euro dans la République d’Irlande) et les distances sont indiquées en milles (en kilomètres en République d’Irlande). Mais Derry est aussi à la frontière nord-ouest de l’Irlande du Nord. À quelques kilomètres, c’est le comté du Donegal, en République d’Irlande (vous pouvez aussi lire mon récit de voyage sur le Nord du Donegal ). Derry était la ville catholique d’Irlande du Nord par excellence. Elle garde encore aujourd’hui très fortement cette identité catholique.

Ça se passe quand (contexte historique) ?

C’est là l’un des intérêts de la série. Bien que l’auteure affirme que la série est plus universelle qu’un programme sur l’Irlande du Nord pendant les conflits internes, à mon sens, il faut tout de même comprendre le contexte historique (et politique) pour apprécier pleinement cette série. Parce que si on n’est pas irlandais/nord irlandais, il peut être difficile de bien comprendre le génie, l’humour et l’audace de Lisa McGee, l’auteure derrière Derry Girls dont je vous parlerai plus en détails plus bas.

Il est facile de se perdre dans les évènements et la chronologie de l’histoire irlandaise. Pas de panique ! Pour Derry Girls, je vous aide à vous resituer dans l’Irlande du Nord de l’époque. 😉

La Saison 1 de Derry Girls débute au cœur des années 90, dans la ville catholique de Derry. A cette époque, l’Irlande du Nord est en pleine guerre civile depuis près de trente ans (on l’oublie souvent, mais la dernière guerre qui a eu lieu en Europe occidentale, c’était en Irlande, il n’y a pas si longtemps que ça). Les bombes, les attentats, les points de contrôles militaires, les couvre-feux, sont le quotidien de la population nord-irlandaise, qu’ils soient de Belfast, de Derry, ou d’ailleurs, catholiques ou protestants. Il existe aussi une frontière bien gardée par les militaires britanniques entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande. Le cœur de cette guerre civile qui voit s’affronter catholiques contre protestants est l’indépendance de l’Irlande ou non vis-à-vis de la couronne d’Angleterre, ou son rattachement ou non à la République d’Irlande.

A Derry, ville à 70% catholique dans les années 90, on se sent en général irlandais et plus proche de la République d’Irlande avec qui on souhaite une réunification. Les protestants se sentent en général culturellement plus proches de la Grande-Bretagne envers laquelle ils ont un profond attachement. Ils se sentent d’ailleurs plutôt Britanniques qu’Irlandais.

Être habitant de Derry dans les années 90, c’est se sentir sous l’occupation ennemie car les troupes britanniques quadrillent la ville de postes de sécurité et effectuent des contrôles pour prévenir d’éventuels attentats.

De plus, à cette époque, c’était très marqué : les catholiques venaient des milieux populaires alors que les protestants étaient en général de milieux plus aisés. C’est très notable dans la série Derry Girls et les allusions à cette réalité de l’époque sont nombreuses.

Dernière chose à resituer à l’époque et qui a son importance dans la série car beaucoup de scènes s’y déroulent : toutes les écoles n’étaient pas mixtes, et il était inconcevable que les communautés religieuses se mélangent. A cette époque, les catholiques vont dans des écoles catholiques dirigées par des religieux et religieuses.

Les affrontements entre catholiques et protestants et la guerre civile nord-irlandaise prennent fin avec les accords de paix de 1998.

Si ce sujet vous intéresse, allez voir la vidéo que j’ai faite pour vous aider à comprendre l’Irlande, simplement. 🙂

Les personnages

On peut débattre sur l’attribution des titres « personnages principaux » et « personnages secondaires » en ce qui concerne la série. C’est presqu’arbitraire et en réalité, ce n’est qu’un détail. 😉 Ce qu’il faut retenir, c’est qu’on suit les aventures de cinq adolescents et qu’au total, on retrouve dans la série une douzaine de personnages récurrents tout aussi drôles qu’attachants !

Le groupe d’adolescents (les « Derry Girls ») :

  • Erin Quinn (jouée par Saoirse-Monica Jackson – si son nom ne vous dit rien, je vous en dis plus à son sujet dans la rubrique « acteurs » de cet article). Elle a 16 ans au début de la saison 1. C’est le personnage central de la série puisque c’est autour de ses amis et de sa famille que l’histoire est articulée. Parfois loquace, parfois lâche, c’est une adolescente pleine de rêves mais aussi de préjugés souvent ébranlés au fil des épisodes.
  • Clare Devlin (jouée par Nicola Coughlan). Avec sa voix reconnaissable parmi tout le collège, c’est la sage et la peureuse du groupe. Elle est aussi fidèle et suit pourtant ses ami(e)s dans toutes les aventures rocambolesques dans lesquelles elles l’entraînent.
  • Michelle Mallon (incarnée par Jamie-Lee O’Donnell). Grande gueule et rebelle, elle est souvent à l’origine des troubles dans lesquels se mettent les cinq amis. Avec son langage fleuri, il lui est difficile d’ouvrir la bouche sans placer un « f*ck » ici ou là. Elle est obsédée par le fait de perdre sa virginité. C’est la cousine de James.
  • James Maguire (interprété par Dylan Llewellyn). C’est le cousin de Michelle. Seul garçon de la bande, son autre malheur, c’est aussi d’être Anglais. Pour cette raison, il va à la même école que celle des filles, car étant Anglais, ce serait trop dangereux pour lui d’aller à l’école des garçons. Arrivant de Londres et confronté à un véritable choc culturel, il ne comprend souvent pas les situations dans lesquelles il se retrouve (les contrôles militaires dans le bus scolaire par exemple).
  • Orla McCool (jouée par Louisa Harland). Je pense que son nom a été choisi pour refléter sa personnalité ! 😉 Elle est souvent « perchée » et dans son monde, souvent en arrière-plan avec des mimiques ou des répliques hilarantes. Orla croit encore aux contes de fée mais surtout « aux boniments » de l’Eglise catholique de l’époque. C’est la cousine d’Erin et vit quasiment sous le même toit qu’elle.

Les autres principaux personnages de la série :

  •  Ma’ Mary (interprétée par Tara Lynn O’Neill). C’est la mère d’Erin, et c’est chez elle que se retrouve le plus souvent le groupe d’ados quand ils ne sont pas à l’école. Elle a du caractère et essaie tant bien que mal de discipliner sa fille aînée. Elle gère aussi toute seule le quotidien de la maison, peu aidée par les autres membres de la famille il faut bien dire.
  • Da’ Gerry (interpreté par Tommy Tiernan). Marié à Mary depuis 17 ans, c’est aussi le père d’Erin. Il a bien du mal à faire entendre sa voix et essaie souvent d’arrondir les angles. Il cherche aussi sans arrêt à se faire bien voir de son beau-père, Joe, en vain.
  • Granda Joe (joué par Ian McElhinney). C’est le grand-père d’Erin, le père de Mary. Il vit sous le même toit qu’eux et est veuf depuis 10 ans au début de la série. Grincheux et patriarche de la famille.
  • Tante Sarah (incarnée par Kathy Kiera Clarke). C’est la sœur de Mary et la mère d’Orla. Bien qu’ayant sa propre maison juste à côté, elle passe le plus clair de son temps dans la maison de sa sœur. Elle s’occupe davantage de sa manicure que de sa fille Orla.
  • Soeur Michael (jouée par Siobhán McSweeney). C’est la directrice de l’école Our Lady Immaculate où sont scolarisés les filles et James. Sévère et sans patience, elle est sans pitié avec le moindre faux pas du groupe d’amis. Elle est aussi exaspérée par tout ce qui touche à la religion catholique que ce soit les chants religieux, les prêtres, ou les miracles. En bref, elle n’aime pas grand-chose.
  • Jenny Joyce (interprétée par Leah O’Rourke). Elève modèle dans la même école que les autres adolescents de la série, elle saisit la moindre occasion pour épingler Erin et ses amis. Très pieuse, elle cherche en permanence la considération de Sister Michael qui de son côté, ne supporte pas les innombrables chants d’amour et de prière de l’adolescente.
  • Derry (qui joue son propre rôle 😉). Et oui ! Je ne suis sans doute pas la seule à considérer que la ville de Derry, où la majeure partie de la série a été tournée, est l’un des personnages clés de la série. On ne compte plus les scènes tournées dans les rues et les quartiers emblématiques de la ville, les références aux fresques, mais aussi la présence presque normale des soldats dans les rues. Même l’école des ados qui, si elle est fictive, fait référence à une école qui existe toujours à Derry, le Thornill College, non loin de la frontière avec le Donegal !

Qui est Lisa McGee, à l’origine de la série ?

Née en 1980 à Derry, elle est à l’origine une auteure de pièces de théâtre (qu’elle a étudié à Belfast). Elle s’est évidemment inspirée de sa vie pour écrire la série Derry Girls, ayant elle-même été adolescente à Derry à l’époque où se passe la série. Au début où elle a pensé faire Derry Girls, elle ne voulait pas parler des conflits, « les Troubles » comme on les appelle, car pour les avoir vécus toute sa jeunesse, elle en avait ras le bol d’en entendre parler. Elle répète souvent en interview que pour avoir grandi en Irlande du Nord, elle en avait marre qu’on ne parle des gens de chez elle qu’à travers les Troubles et qu’il se passait plein d’autres choses de bien en Irlande du Nord. Elle voulait montrer qu’ils étaient aussi drôles et chaleureux, un autre aspect de l’Irlande du Nord qu’elle connaissait et dont on ne parlait jamais. Elle dit souvent que le sens de l’humour si particulier à l’Irlande du Nord était un moyen de survivre à tout ce qui se passait autour. Elle voulait aussi faire un show qui montrait des personnages féminins, irlandaises et drôles qui plus est, parce qu’elle trouvait qu’il y avait trop de personnages masculins à la télé et que le peu de femmes irlandaises à l’écran était souvent tristes ou mélancoliques. Grâce au succès de Derry Girls, elle a gagné des récompenses notables notamment celle de la meilleure scénariste de comédie britannique en 2018 et 2019.

Les acteurs de la série sont unanimes et ne tarissent pas d’éloges sur l’écriture de Lisa McGee, qui est pour eux le principal facteur de réussite de la série.

Qui sont les acteurs principaux ?

Avec leur accent à couper au couteau et leurs apparences d’ados tout ce qu’il y a de plus normal, il est évident que les acteurs principaux de la série à succès soient tous de jeunes adultes de Derry, me direz-vous. En êtes-vous bien sûrs ? 😉

  • Saoirse-Monica Jackson (joue Erin Quinn) est née à Derry en 1993, pile à l’époque où se passe la série. Elle a grandi en partie dans le Donegal où ses parents tenaient un pub. Elle a étudié le théâtre en Angleterre même si avant d’incarner le personnage central de la série, elle était vendeuse. Elle se dit très fière d’incarner un personnage de la ville où elle a grandi qui a toujours été mal considérée, et de jouer avec son accent, chose qu’elle ne croyait jamais être possible.
  • Nicola Coughlan (interprète Clare Devlin). Elle est née en 1987 à Galway où elle a grandi (difficile à croire tant son accent est terrifique dans la série !). Elle aussi a étudié le théâtre en Angleterre où elle vit toujours.
  • Jamie-Lee O’Donnell (joue Michelle Mallon) est née en 1987, à Derry. Elle s’est faite un peu connaître en Irlande dans la série télévisée 6Degrees où elle jouait le rôle d’Eva Maguire, étudiante à Belfast.
  • Dylan Llewellyn (incarne James Maguire) est un acteur Anglais né en 1992. Il travaillait dans un café au moment où il a été contacté pour Derry Girls.
  • Louisa Harland (Orla McCool) est née à Dubin (eh oui ! 😉) en 1993 et a elle aussi étudié le théâtre en Angleterre. On l’a vue brièvement à l’écran dans une série en 2011. Son père est de Belfast ce qui fait qu’elle avait tendance à faire l’accent de Belfast qui est différent de celui de Derry. Elle ne connaissait pas Derry (ni son accent 😉 ) avant de jouer dans Derry Girls. Elle a changé sa voix pour le rôle pour l’aider à faire le personnage d’Orla et à prendre l’accent de Derry.

En ce qui concerne les adultes, pour la plupart, leurs visages sont un peu plus familiers, au moins sur les télés irlandaises. 😊

  • Tommy Tiernan (joue Gerry, le père d’Erin), il est d’un peu partout en République d’Irlande, mais en tout cas, il n’est pas de Derry (et oui, encore un !) ! 😉 C’est sans doute l’acteur de Derry Girls le plus populaire en Irlande. Il est connu pour être animateur radio et télé, il fait aussi des stand-ups, il a joué dans quelques séries. Bref, il fait partie du paysage audiovisuel en Irlande.
  • Ian McElhinney (incarne Joe, le grand-père d’Erin) est né à Belfast. Il est connu pour une longue carrière sur les écrans télés mais aussi de cinéma. Si vous êtes fan de Game of Thrones, son visage vous dit peut-être quelque chose. 😉 En effet, il y a joué le rôle de Barriston Selmy. 😉
  • Tara Lynne O’Neill (interprète Mary, la mère d’Erin) est aussi née à Belfast. Peut-être moins populaire que les deux acteurs cités au-dessus, son visage est néanmoins familiers des écrans irlandais et britanniques. Elle a par exemple joué dans Eastenders, un célèbre soap opera britannique.

Pourquoi ce programme a gagné un succès à l’international ?

Peut-être ne connaissez-vous pas cette série, Derry Girls. Je vous donne quelques chiffres clés pour vous donner une idée :

  • La première diffusion sur Channel 4 en janvier 2018 a attiré 3.2 millions de téléspectateurs.
  • Le reste des épisodes des deux saisons diffusées sur Channel 4 ont continué de rassembler en moyenne 3 millions de téléspectateurs.

Très bien, me direz-vous, mais là, on parle d’un succès en Grande-Bretagne et en Irlande, pas à l’international. C’est vrai.

C’est là que Netflix intervient, intéressé bien sûr par ce succès qui a battu tous les records de la chaîne britannique. C’est en décembre 2018 que Derry Girls a été diffusé pour la première fois sur Netflix. Presqu’un an après sa première diffusion sur la chaîne britannique. Dès lors, le succès a été grandissant. Du Pakistan à l’Argentine, en passant bien entendu par les Etats-Unis ou la Nouvelle-Zélande, l’engouement se trouve partout, sur les réseaux sociaux ou les plateaux télévisés.

Mais alors, pourquoi un tel succès ?

Difficile à dire à première vue. Sur le papier, ce n’était pas gagné. Effectivement, une comédie basée sur cinq adolescents pendant une guerre civile en Irlande du Nord, dans une ville qui est tout sauf sexy, avec un accent incompréhensible pour la plupart des gens sur la planète, y compris des anglophones, ce n’était pas vraiment ce qu’on peut appeler les clés du succès. Et pourtant !

J’ai beaucoup lu et écouté d’interviews et d’émissions sur Derry Girls, et même s’il est toujours difficile de comprendre un succès (encore plus de le prévoir), voici quelques éléments explicatifs qu’on peut faire ressortir.

  • Contraste entre humour et émotions. Tout repose ici sur l’écriture de Lisa McGee, appuyée par la réalisation (Michael Lennox), un subtil mélange de rires et de larmes. La dernière scène du dernier épisode de la Saison 1 en est l’exemple type : on rit du ridicule des ados, et sans prévenir, coup de poignard : on se retrouve à pleurer en réaction à la gravité de la situation qui se passe au même moment, dans les rues de la ville. Globalement sur les saisons, le contraste entre l’innocence des jeunes et la réalité de l’extérieur est mis en scène d’une manière presque perturbante. Et ça rend vite accro ! 😉
  • Un humour bien particulier. Celui de Derry. Assez cinglant. Mais finalement, le comique de situation est universel, car tout le monde se retrouve dans ces années d’adolescence, ou au collège, qu’on soit de Derry, de Londres, ou d’ailleurs. Et à nouveau, le travail d’écriture de Lisa McGee y est pour beaucoup !
  • Une série pour tous les groupes d’âge. Même si on pourrait croire la série à destination des jeunes adultes, elle a en réalité du succès dans tous les groupes d’âges, absolument tous. La raison est qu’à nouveau, même si on a soixante ans, on peut s’identifier à ces jeunes adolescents, car leurs rêves, leurs espoirs, leurs bêtises, sont ceux de millions d’adolescents sur la planète, qui sont, ou qui ont été.
  • Le contexte historique. La guerre civile nord-irlandaise a été largement médiatisée dans le monde entier, même si au final, cela reste trouble (sans mauvais jeu de mot) pour la majorité d’entre nous. Derry Grils, c’est l’occasion de revisiter cette période de l’histoire irlandaise. Pour beaucoup même, de la découvrir. L’acteur Dylan Llewellyn, qui joue le rôle du jeune James venant de Londres, est Anglais. Il avoue qu’avec la série il a découvert toute cette période de l’histoire car ce n’était pas enseigné dans les écoles britanniques.
  • Comédie et Histoire à la fois. C’est aussi une autre chose qui plaît, c’est que cette comédie a pour fond un contexte historique, et dans certains épisodes, elle fait complétement références a des faits qui se sont réellement passés.
YouTube

En chargeant cette vidéo, vous acceptez la politique de confidentialité de YouTube.
En savoir plus

Charger la vidéo

  • Des vérités comme un miroir. Je vais vous donner un exemple. Dans l’épisode 4 de la saison 1, les familles de Derry reçoivent des jeunes de Chernobyl. Dans l’un des échanges, Clare s’adresse à une jeune ukrainienne en disant qu’ici à Derry, ils comprennent totalement le malheur de ces jeunes, qu’eux aussi vivent dans le malheur. La jeune ukrainienne reste d’un grand sang froid pour lui répondre que non, ça n’a rien à voir. Elle, elle a eu sa ville détruite par l’explosion d’une centrale nucléaire, alors qu’à Derry, ils font une guerre stupide entre gens d’un même pays, et que personne ne comprend pourquoi. Ce à quoi Clare répond que ce n’est pas stupide, qu’eux sont catholiques, et qu’ils se battent contre les protestants. L’adolescente ukrainienne de lui rétorquer que c’est encore plus stupide, parce que le catholicisme et le protestantisme sont des religions sœurs, et qu’ils croient en un seul et même dieu. Fin de la scène.
  •  Mise en lumière d’une ville dont on a tous entendu parler, mais qu’on connaît peu. Derry est tristement célèbre pour toute personne qui avait la télévision entre les années 70 et la fin des années 90, du tristement célèbre Bloody Sunday aux nombreux attentats qui y eurent lieu. Derry Girls met le projecteur sur cette ville célèbre mais finalement peu connue, ses gens, son humour.
  • La religion. Même si on n’est ni catholique, ni protestant, pour beaucoup d’entre nous nous avons, si ce n’est vécu mais au moins observé autour de nous, le dogme religieux qu’il peut y avoir parfois dans nos sociétés. C’est d’autant plus marqué pour le public plus âgé qui a pû connaitre une présence et une influence religieuse plus importante dans la société par le passé.
  • Une série arrivée en plein Brexit. On ne peut pas regarder Derry Girls sans penser au Brexit et aux conséquences de celui-ci sur l’Irlande du Nord. En effet, voté par référendum en juin 2016, le Brexit suscite de nombreux débats et inquiète aussi beaucoup sur la paix toute relative et fragile en Irlande du Nord. Derry Girls nous le rappelle inévitablement.
  • Une série menée par des personnages féminins. C’est l’une des raisons qui peut expliquer le succès, même si pour moi ce n’est pas la raison principale.  D’autant plus qu’il est rare de voir un programme télévisé où les femmes ne sont pas sexualisées. Dans Derry Girls, il est question d’un groupe de filles encore très innocentes, presqu’à la sortie de l’enfance.
  • La sélection musicale (ou soundtrack). Bien sûr, le succès de Derry Girls ne repose pas uniquement sur la sélection musicale choisie, mais elle y contribue également. Lisa McGee est fan des Cranberries, et ça s’entend ! Il est vrai que qui mieux qu’eux pour illustrer cette période en Irlande du Nord ? Mais Derry Girls, c’est aussi un ADN musical qui vous replonge tout droit dans les années 90 (encore plus si comme moi, vous étiez ado à cette époque 😉) : Take That, 2 Unlimited, Supergrass, Blur, Salt N Pepa, et j’en passe ! Il y a aussi des classiques d’autres époques, que ce soit ABBA ou Madona.
YouTube

En chargeant cette vidéo, vous acceptez la politique de confidentialité de YouTube.
En savoir plus

Charger la vidéo

  • Les tabous. Ce point est plus délicat, beaucoup plus lié à l’Irlande, et je parlerai plutôt ici d’«aspect novateur» plutôt que de raisons du succès. Derry Girls aborde ici frontalement tous les tabous de l’Irlande, dont on ne parle jamais publiquement : Les conflits en Irlande du Nord, la religion, l’avortement, et l’homosexualité. Dès le premier épisode par exemple, on apprend que James est né à Londres mais que sa mère était initialement partie y avorter… Comme des milliers d’Irlandaises chaque année, car l’avortement était encore illégal en Irlande du Nord jusqu’en Octobre 2019 (2018 en République d’Irlande). Le sujet est encore largement tabou. Si l’homosexualité est aujourd’hui bien intégrée dans la société irlandaise, c’était loin d’être le cas dans les années 90. Or, l’un des cinq amis révèle son homosexualité dans la première saison de Derry Girls. Quant au sarcasme de la série vis-à-vis de la religion catholique, même s’il y a eu Father Ted, une autre comédie à succès de Channel 4 dans les années 90, ça reste encore assez rare de le faire de manière publique en Irlande. D’ailleurs, je ne sais pas si c’est lié, mais à ce jour, et malgré le succès, je n’ai encore jamais entendu parler de cette série au pub…

Derry Girls, une suite ?

La première saison de 6 épisodes a été diffusée en 2018.

La deuxième saison de 6 épisodes a été diffusée en 2019.

La troisième saison devait être tournée au printemps 2020, mais a été reportée à cause du COVID-19. C’est à l’automne 2021 qu’a enfin pu commencer le tournage de la saison 3 de Derry Girls, annoncée comme étant la dernière. Le premier épisode de la saison 3 a finalement été diffusé sur Channel 4 le 12 avril 2022.

Que les fans se rassurent : on pourrait aussi voir LE FILM ! Lisa McGee avoue être intéressée mais elle veut trouver la bonne structure et la bonne histoire pour mener les Derry Girls sur grand écran. De quoi ravir les fans du monde entier !

Le saviez-vous ?

 Des sous-titres nécessaires même pour les anglophones. Même s’il est fréquent chez les anglophones de ne pas très bien comprendre les accents irlandais (davantage encore de la part des Américains et Canadiens), ceux de Derry et d’Irlande du Nord semblent être particulièrement difficiles à comprendre. Il est vrai que c’est sans doute l’un des plus difficiles à comprendre sur toute l’île d’Irlande. C’est d’ailleurs un sujet récurrent et pris avec humour quand on parle de la série : il semble que les sous-titres soient nécessaires pour beaucoup, y compris les anglophones. Alors ne soyez pas complexés si vous en avez besoin vous aussi! 😉

Filmé en partie dans les studios de Game of Thrones. Effectivement, Derry Girls a bien entendu été filmé à Derry, mais aussi à Belfast. Le programme a effectivement bénéficié des énormes studios de cinéma qui ont été créés pour une autre série, Game of Thrones, qui a elle aussi contribué à mettre en avant l’Irlande du Nord, pour ses magnifiques paysages jusqu’alors moins connus du grand public.

Derry girls - Fresque murale
Derry Girls – Fresque murale. Derry/Londonderry, Northern Ireland. (c) Allan LEONARD @MrUlster

A Derry, une fresque murale à l’effigie de la série. Et oui ! Il n’en fallait pas tant pour qu’on voit apparaître une nouvelle fresque murale dans les rues de Derry ! Elle recouvre tout un pan de mur d’un pub. Un bel hommage qui révèle à quel point les habitants de Derry sont fiers de cette série qui y a été aussi très bien accueillie.

Voilà, cet article était long, je le sais, mais il m’était impossible de faire autrement si je voulais faire le tour de cette série sur laquelle on en apprend beaucoup sur l’Irlande du Nord, mais avec laquelle on rit surtout beaucoup ! 😊 Alors bravo à vous si vous êtes arrivés jusqu’ici ! 😉

Et vous, avez-vous déjà vu cette série ? Est-ce que cet article vous a donné envie de la regarder (ou re-regarder) ?

Laissez un commentaire pour partager votre avis sur la série ou cet article. 😊

Et pour en découvrir davantage sur l’Irlande, sa culture, les Irlandais, je vous propose de recevoir le livre numérique que j’ai écrit, où vous découvrirez 20 anecdotes culturelles propres aux irlandais ! Je vous l’offre, ainsi que ma version revisitée d’une très célèbre légende irlandaise ! Il suffit simplement de remplir le formulaire ci-dessous ! 😉

Haut de page

Posted in Histoire et patrimoine irlandais, Télévision et Cinéma

8 Comments

  1. Alexandre Willocquet

    Bravo pour cet article très complet et qui m’a donné envie de découvrir cette série ! 🙂
    Qui sait, j’y trouverai peut-être aussi matière à inspiration pour un article ? 🙂

    • Aurélie Gohaud

      Merci Alexandre, et ravie d’apprendre que je t’ai donné envie de regarder cette série que j’aime beaucoup aussi. 🙂 Et si en plus ça t’inspire, c’est génial! 😉

  2. Orianne Zadra

    Merci pour cet article ! J’ai adoré cette série, je dois avoir regardé chaque épisode 7 ou 8 fois, alors que ça fait à peine plus d’un an que je l’ai découverte. Je suis complètement fan de l’humour, du jeu des acteurs (leurs expressions sont terribles), la bande originale me ramène à mon adolescence (Take That était mon groupe favori !!!), et ce mix entre émotion liée au contexte historique et humour est parfait (les fins des derniers épisodes de chaque saison me tirent les larmes à chaque fois…) Bref, j’adore, j’attends la saison 3 avec impatience !!!

    • Aurélie Gohaud

      Haha ! Je suis aussi complètement fan, et j’ai aussi vu les épisodes nombres de fois (ça repasse déjà souvent à la TV ici)… et je suis aussi aux aguets pour la saison 3, j’en parlerai dès que j’aurai du nouveau sur le sujet. 😉

  3. Estelle

    Un grand merci pour cet article très complet 😄 étant fan de l’humour anglo-saxon, j’adore cette série que je trouve extrêmement bien écrite dans son humour et dans le rapport à l’adolescence avec beaucoup d’émotions autour d’un conflit que je connaissais quasiment pas (à part la chanson Sunday bloody sunday de U2). La bande son est absolument incroyable (j’ai voulu refaire la choré Rock on the boat que j’ai trouvé hilarante) avec la chanson Dreams de The Cranberries.
    J’ai regardé le premier épisode en direct (même en ne comprenant pas tout avec l’accent 😂🤣( par internet ce soir avec comme guest-star surprise : Liam Neeson !! Je ne suis pas prête à ce que la série se termine. Je découvre ton blog un grand merci je suis sûre que je vais apprendre plein de choses !

  4. Sihem

    Merci pour cet article, je viens de finir de visionner le dernier épisode de la dernière saison, que j’ai adoré et que j’ai conseillé à mes nièces, amies et même à mon père, pour dire mon engouement pour l’humour, l’accent de Derry, mais aussi pour revenir sur une période sanglante que j’ai doublement vécu pour ma part! Je me souviens des troubles en Irlande du nord diffusés à chaque attentat aux infos, mais surtout par ce que je partage avec les personnages: mes souvenirs musicaux, une adolescence vers ces eaux là (en 1993 j’avais 16 ans) mais surtout, mon pays vivait une guerre civile aussi sanglante que la leur, à savoir l’Algérie! Et comme eux, on avait une adolescence à vivre, des histoires d’amour à rêver et un avenir à préparer! Si mes souvenirs sont teintés de sang, il n’empêche j’ai vécu une adolescence semi-normal, entre attentat et fêtes, entre rupture amoureuse et la perte de gens qu’on aimait ou connaissait, entre plage et couvre feu, on voulait vivre malgré tout. Il n y a pas que la décennies noires en Algérie, il y a eu nous qui vivions comme si demain devait ressembler à autre chose, et comme dirait Erin, on a fabriqué nos propres rêves. Bizarrement, à l’instar d’Erin, Claire, Michelle, Orla et James, je dis souvent que j’ai eu une adolescence absolument géniale, avec mes amis on s’est amusé malgré l’horreur, je dirais même que l’horreur nous a rendu résilient et ça l’est toujours!

    • Aurélie Gohaud

      Merci beaucoup pour votre commentaire très touchant. L’une des forces de Derry Girls, c’est aussi son réalisme et son universalisme. Votre témoignage en est la preuve.

Laisser un commentaire